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La hache en bronze, un outil en constante évolution
Les premières haches en bronze, ou en cuivre pour les plus anciennes, dites « haches plates », imitaient les lames de pierres polies de la fin du Néolithique. De forme trapézoïdale, il faut les imaginer de couleur dorée car leur patine verte est due à l’oxydation ; le bronze étant un alliage de cuivre et d’étain. Les haches étaient fabriquées dans des moules, en terre cuite ou en pierre, dans lesquels était coulé le bronze en fusion.
Dans un second temps, les haches plates seront munies de rebords latéraux perpendiculaires au corps de la hache. Les archéologues les ont appelées « haches à rebords ». Cette particularité servait à bloquer le manche coudé en bois qui s’encastrait dans la lame du côté du talon ; dispositif complété d’un lien probablement en cuir.
C’est le cas de la hache plate retrouvée dans la région de Nemours et qui est l’une des plus anciennes haches de bronze conservées au musée. Elle est datée du Bronze ancien (entre 2200 et 1600 avant J.-C.). De forme évasée au niveau du tranchant, cette hache possède de très légers rebords.
Les haches à rebord sont fondues dans des moules bivalves, la coulée s’effectuant par la partie proximale (opposée au tranchant) de l’outil. La trace de séparation longitudinale des deux valves du moule est encore visible sur les côtés des haches brutes de fonderies. Généralement ces traces (ou bavures) sont éliminées par polissage.
La forme des haches évoluera au fil du temps et selon les régions. Les rebords seront de plus en plus marqués comme l’atteste les quatre haches retrouvées à Misy-sur-Yonne « les Refuges » (Seine-et-Marne) attribuées au début du Bronze moyen et datées des environs de 1600 - 1500 avant J.-C.
Les rebords parfois, légèrement rabattus vers le centre, annonce les haches à ailerons du Bronze final. La hache en provenance de Saône-et-Loire, montre cette tendance.
Parallèlement, une forme nouvelle fait son apparition : la hache dite « à talon ». Caractéristique de la fin du Bronze moyen, ce type de hache se répand en Europe avec des variantes régionales entre 1500 et 1350 avant J.-C.
La hache à talon possède une sorte de butée, le talon, qui permet d’arrimer la lame au manche plus solidement que dans les modèles plus anciens. Certains modèles de haches à rebords, comme les haches de Misy-sur-Yonne (Seine-et-Marne) et la hache de Dravegny (Aisne), possédaient l’amorce d’une butée en leur centre. Ces formes hybrides témoignent des tentatives d’innovations des différentes techniques d’emmanchement.
Le talon est formé de deux gorges dans lesquelles s’encastre l’extrémité fendue du manche coudé en bois. Sa forme et sa longueur par rapport à la lame diffèrent selon les régions.
Les haches sont des marqueurs culturels qui contribuent à définir des groupes de population.
La hache découverte à Faÿ-les-Nemours (Seine-et-Marne) appartient au type dit « normand » (car très présent en Normandie), celle qui a été retrouvée dans le lit du Grand-Morin à Coulommiers (Seine-et-Marne) s’apparente au type dit « de Hagueneau », surtout répandu dans l’Est de la France. Cela montre que l’Île-de-France était alors située entre deux influences culturelles occidentales et orientales.
Le dépôt de Machelles (Faveraye-Machelles, Maine-et-Loire) est constitué de 5 haches à talon de type « breton ». Il en aurait contenu sept à l’origine, deux ayant disparu. Elles se ressemblent et illustrent la production massive de haches à talon qui couvre une grande partie de l’Europe occidentale à cette époque de l’âge du Bronze, entre 1500 et 1350 avant J.-C.
Trouvées isolées ou groupées, parfois associées à d’autres objets de bronze, ces haches sont si nombreuses et si semblables que l’on suppose qu’elles ont été produites en série.
Au Bronze final (1350 - 800 avant J.-C.), les haches en bronze présentent de nouveaux perfectionnements destinés à améliorer l’emmanchement.
Les rebords, constatés sur le type des haches plates du début de l’âge du Bronze, s’allongent jusqu’à former des « ailerons médians » destinés à enserrer le manche. C’est le cas de la hache de Dourdan (Essonne), qui est datée du début du Bronze final vers 1350 - 1150 avant J.-C.).
Il existe des moules qui montrent que les ailerons étaient fondus verticalement et qu’ils étaient recourbés postérieurement au moulage.
Par la suite, les ailerons ont tendance à être déportés vers la partie proximale, comme la hache de Choisy-aux-Bac (Oise), ce qui allonge la longueur de la lame. Les ailerons sont dits alors « subterminaux ». Ces haches peuvent être dotées d’un anneau latéral destiné à renforcer la ligature.
Une forme semblable, à ailerons et anneau latéral, a été retrouvée à Boissy-aux-Cailles, « la Cave-aux-Moines » (Seine-et-Marne). Elle faisait partie d’un dépôt d’objets de bronze, daté des environs de 900 à 800 avant J.-C. Dans ce même dépôt, figurait également une hache à douille, correspondant à un type d’emmanchement radicalement différent de celui de la hache à ailerons et qui lui est contemporain.
La douille est un orifice, situé sur la partie proximale de l’objet, qui permet d’y insérer le manche. Cette technique est également utilisée pour l’emmanchement d’autres outils comme les marteaux ou les gouges, objets également présents dans le dépôt de Boissy-aux-Cailles.
Des haches à douille, de qualité moindre, ont été fabriquées en très grande quantité au Premier âge du Fer. Certains dépôts comptent des centaines d’exemplaires. Peu fonctionnelles, elles évoquent une sorte de proto-monnaie ou des objets votifs.