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Les nécropoles de Gravon : le reflet d’une petite communauté gauloise

Dans les années 1960, l’exploitation des sables et des graviers à Gravon (Seine-et-Marne), en bordure de Seine, a favorisé la découverte de deux vastes nécropoles gauloises.

Deux grandes nécropoles en partie détruites

Des implantations plus anciennes

À Gravon, en rive gauche de la Seine, deux nécropoles de La Tène (ou Deuxième âge du Fer) ont été mises au jour, l’une en 1960-1961, l’autre en 1968. La première nécropole fouillée, située en limite ouest de la commune au lieu-dit “Le Chemin de l’Écluse”, comprenait 36 sépultures qui s’étendaient sur une superficie d’environ 2 500 m².

La seconde nécropole, localisée à 1 km à l’est de la précédente au lieu-dit “La Souricière”, a livré 10 sépultures réparties sur 5 000 m².

En grandes partie détruites par les carrières, les limites de ces deux nécropoles ne sont pas connues.

Toutes les deux étaient implantées sur des ensembles funéraires fondés à l’âge du Bronze.

Des inhumations d’adultes et d’enfants

Le reflet d’une petite communauté locale

Au lieu-dit “Le Chemin de l’Écluse”, les sépultures étaient pour l’essentiel des inhumations (35 sur 36) aménagées dans des fosses allongées aux dimensions des corps. Elles devaient être scellées par des pierres formant un dallage en surface pour en marquer l’emplacement. Détruit plus tard par les labours, ce dallage a néanmoins subsisté dans certains cas. En général les sépultures étaient individuelles, mais quelques-unes ont révélé la présence de deux corps. Ces 36 sépultures concernaient au moins 28 adultes (hommes ou femmes), 5 enfants et un adolescent probablement de sexe masculin, soit 39 individus au total.

Bien qu’incomplet, cet ensemble funéraire était probablement le reflet d’une petite communauté installée à proximité. Les corps étaient allongés sur le dos, la tête le plus souvent au nord-ouest ou au sud-ouest. Une seule sépulture présentait les traces évidentes de décomposition d’un coffrage en bois, sorte de cercueil aménagé dans la fosse. Cependant, la plupart des squelettes ont été dégagés dans un sédiment noir provenant probablement de l’altération d’un linceul ou d’une litière en matière végétale.

Des armes et des parures

Des indices révélant le statut des défunts

Parmi les 28 adultes, quatre d’entre eux étaient accompagnés d’un équipement militaire plus ou moins complet : épée dans son fourreau, chaîne de suspension faisant office de baudrier, fer de lance, bouclier. En plus de ces tombes d’hommes en arme, 10 autres sépultures d’adultes présentaient des parures ou des accessoires vestimentaires : fibules en fer, torques en bronze, bracelets en bronze, bagues en bronze, anneau en schiste, perles en verre et chaînette en bronze.

Ces objets permettent de dater la nécropole de la fin du IVe et du début du IIIe siècle avant notre ère. Les sépultures d’enfants n’ont livré aucun objet, du moins en matière non périssable.

Une seule incinération

Le signe d’un changement de pratique funéraire

Sur les 36 sépultures attribuées à La Tène, une seule sépulture à incinération a été mise au jour à proximité de fossés quadrangulaires formant des petits enclos. L’urne, déposée dans une petite cavité creusée dans le sol, contenait des restes osseux incinérés et une fibule en fer. Les caractéristiques de l’urne et de la fibule permettent d’affirmer que cette sépulture est plus tardive que les inhumations (fin IIIe ou IIe siècle avant J.-C.).

Une réutilisation de monuments funéraires de l’âge du Bronze

Un privilège réservé aux personnages de haut rang

La répartition des inhumations au sein de la nécropole semble régie par des modalités diverses. La plus significative est celle illustrée par les sépultures occupant l’aire délimitée par un fossé circulaire, vestige d’un tumulus de l’âge du Bronze. Au centre, une sépulture d’adulte armé d’une épée et d’une lance et paré d’une bague en bronze à l’annulaire droit était attribuable sans conteste à La Tène, mais elle contenait aussi dans son comblement les restes d’une incinération de l’extrême fin du Bronze final (entre 900 et 800 avant J.-C.).

Dans ce même tertre, deux autres tombes d’adultes de La Tène étaient placées autour de la sépulture centrale. Ce mode semble perpétuer les pratiques funéraires de l’âge du Bronze ; comme à cette époque, il devait être réservé à certains personnages, sorte de notables à l’échelle de la communauté des vivants.

Dérivé du mode précédent, un autre exemple est celui d’une sépulture placée au centre d’un petit enclos carré, délimité par une tranchée. Il s’agissait là aussi d’un adulte armé d’une épée dans son fourreau avec sa chaîne de suspension (baudrier), d'une lance et d’un bouclier dont seul l'umbo est conservé ; la fosse sépulcrale était parallèle à deux des quatre côtés de l’enclos. Dans ce cas, il y a lieu de penser que l’enclos est contemporain de la sépulture. Cependant, on ignore l’image que l’ensemble pouvait présenter en élévation. Les autres sépultures paraissent organisées en rangées.

Deux nécropoles à peu près contemporaines

Un vaste ensemble funéraire d’époque gauloise

Au lieu-dit “La Souricière”, les 10 sépultures mises au jour, toutes des inhumations, étaient assez mal conservées. Ce sont essentiellement des sépultures individuelles d’adultes présentant à peu près les mêmes caractéristiques que les inhumations de la nécropole du « Chemin-de-l’Écluse » : même orientation des corps, vestige d’un coffrage pour l’une des sépultures, réutilisation de monuments funéraires plus anciens, présence d’un large enclos quadrangulaire et deux petits enclos carrés qui datent très probablement de l’âge du Fer.

Les armes, parures et accessoires vestimentaires retrouvés dans les sépultures permettent de situer l’utilisation de ces deux cimetières durant la période gauloise et plus précisément – mise à part l’incinération, plus récente d’un siècle, - de la fin du IVe au début du IIIe siècle avant J.-C.